Le rêve assassiné de Maïa Alonso
J'ai intégré le lien du blog de l'Auteur
Remise
de Prix pour ce bel ouvrage à son Auteur Maïa ALONSO
Edition Atlantis Collection France-Algérie.
Ce roman-vrai ne laissera aucun lecteur indifférent car il
s'agit d'un témoignage poignant de vérité, Le style personnel de Maïa ALONSO
donne à l'histoire d'une famille présente en Algérie de 1870 à 1962, de la
profondeur. La Préface du livre a été écrite par les enfants de Madeleine et
Félix VALLAT : Bernard, Paul et Jean-Félix VALLAT. Ce bel ouvrage doit
contribuer à la mémoire collective.
Un drame perpétré à une époque douloureusement rappelée
à nos mémoires amputées pour beaucoup d'entre nous aujourd'hui pour ce qui
est de cette période précise de notre Histoire, la guerre d'Algérie que
négligemment nous nommons encore " les Événements d'Algérie ".
L'Auteur de ce " Rêve assassiné " nous révèle des personnalités
qui se sont battues, et elles n'étaient pas les seules, dans une dramatique
réalité croissante, complexe et terrifiante tout en gardant foi en l'avenir.
Les personnes citées Madeleine et Félix Vallat ont bien
existées et ont été assassinées le 8 avril 1958 à Thiersville Village de France
près de Mascara en Algérie. Ce couple revit sous la plume de Maïa ALONSO Auteur
doté d'une grande sensibilité et d'une grande objectivité. Bon nombre de
témoins ont été remerciés chaleureusement par l'Auteur, ils ont contribué
à relater les faits avec véracité. Le lecteur suit cette femme et cet homme
dans l’insouciance et l'espoir d'un avenir heureux d'abord sur une Terre qu'ils
aiment profondément et qu'ils respectent, ils vont la faire prospérer avec
passion puis le lecteur les suit dans l'absurdité d'une politique injuste
et incertaine qui se traduit d'abord par de tragiques attentats puis
des déchaînements de violence inouïe, il les voit anéantis par
l'horreur d'une guerre civile, fratricide, qui s'amorce.
Je pense à la lecture de cet ouvrage que la
profonde conviction de cette femme et de cet homme était loyale.
Romantisme ou utopie ? ... utopie peut-être mais : “ Une société sans pensée
utopique est inconcevable. Utopie au sens de désir d'un mieux.” c'est une
citation de Jean-Claude Carrière et elle me convient ici.
Madeleine et Félix vont vivre deux guerres. En 1940 une
permission, une rencontre, un coup de foudre et leur histoire commence
même si elle est un peu compliquée au début par l'absence des parents de
Madeleine tous les deux s'adorent mais les temps sont difficiles. Tandis que
Madeleine étudie pour devenir institutrice Félix va faire ses classes en
Angleterre dans la Royal Air Force, il sera pilote. Avant de partir ils
s'engagent mutuellement. L'assentiment des parents qui leur tient tant à cœur
viendra un peu plus tard, Madeleine et Félix se fiancent à cette époque et
vont penser très sérieusement à leur mariage. Mariage qui se concrétisera enfin
à la fin de la guerre. Madeleine et Félix, le couple s'établit à
Mercier-Lacombe dans la ferme Perret Terre de vent où ils se
croient à l'abri si près de Thiersville alors que dans le
pays commencent des bouleversements politiques qui vont engendrer le
désastre et l'aboutissement que personne à
l'époque n'aurait imaginés.
Page 82 ...
" This is the time for everyone to stand together and hold firm ". Ils
traduisirent ensemble
" Le temps est venu pour nous tous de nous unir et de
tenir bon ".
D'un caractère fort et ambitieux doté d'une solide foi en
l'avenir Félix pensait sincèrement qu'il fallait Progresser, travailler dur
pour que cette terre aride et revêche enfin domptée par l'homme courageux
rende le maximum d'elle-même. Cela fut fait, au fil du temps, au fil d'un
temps où l'insécurité grandissait. Madeleine et Félix eurent trois enfants,
trois garçons dont vous pourrez lire les mots bouleversants en Préface du
livre. Maïa ALONSO nous fait apprécier tous les moments de bonheur de
cette belle famille dans ce pays magnifique qu'ils aimaient tous deux
profondément, Félix toujours très occupé tandis que Madeleine " dévorée
par son rôle de mère « voyait le temps filer et sentait le danger monter
inexorablement, le tempérament fougueux de son époux, son désir de voir
Thiersville et sa région prospérer tout en respectant les habitudes des deux
communautés, leurs cultures et leurs traditions.
En 1954 Félix Vallat devient maire de Thiersville.
Page 104 ... je reste confiant, nous réussirons avec de la
bonne volonté et surtout des actes forts de justice pour que fonctionne
l'entente fraternelle. Il faut commencer par donner plus de responsabilités aux
hommes de chez nous. Ils en ont les capacités. Je les connais depuis l'école et
même avant. On a toujours été ensemble quand on était gosses. Aucun enfant de
Thiersville ne doit en être éloigné. Tous unis, nous ferons de notre village le
plus beau village de France !...
Le terrorisme. Les attentats se faisaient de plus en
plus oppressants et Madeleine le signalait dans son journal intime.
L'appréhension, la peur, l'insécurité commençaient à prendre une place de plus
en plus importante dans le déroulement de leur vie quotidienne. Des amis
proches de Félix et Madeleine furent assassinés. Toujours prêt à améliorer le
sort de chacun, Félix se mettait finalement en danger mais il n'y croyait pas,
il avait confiance. En 1955 Mokhtar Boucif un enfant du village, un frère,
un ami d'enfance de Félix fut muté à Thierville et nommé directeur de l'école
des garçons. L'époque où Madeleine obtint son permis de conduire et où
Félix décida que la famille quitterait Mercier-Lacombe et s'installerait à
Thiersville même alors que l'état d'urgence était décrété.
Tout s'accélère, tout se bouscule, beaucoup sont massacrés,
tous sont terrorisés ... Mokhtar Boucif l'ami de toujours change de visage
lorsqu'il s'adresse, par la main et la pensée de Maïa ALONSO, à Félix au cours
d'une longue conversation, Les Européens « sont des usurpateurs qui ne sont pas
chez eux. Ils devront partir ou mourir ". Pages 187 à 196 Maïa ALONSO
exprime si bien ce dialogue on y retrouve la situation dans laquelle le monde
se trouve aujourd'hui avec cette dérive d'une religion, d'un Dieu glorifié à
l'extrême que nous ne pouvons atteindre ne fut-ce que par l'esprit.
Page 194 ... De même que tous les Arabes ne sont pas
pauvres, tous les colons ne sont pas riches. Certains sont même aussi pauvres
que nos pauvres. Je le sais bien, nous le savons bien. Mais comprenez qu'il
nous est difficile d'accepter cette joie de vivre fanfaronne qui vous
caractérise tous. Nos jeunes vous envient et se détournent du chemin...
Les jeux sont faits si l'on peut parler ainsi,
Madeleine et Félix sont condamnés à mort pour une cause qui n'était plus
envisageable ni défendable hélas. Ils mourront sous les tirs d'un commando du
FLN le 8 avril 1958 comme le furent beaucoup d'autres après eux encore.
Leurs trois enfants furent par une chance inouïe épargnés mais ils n'oublieront
jamais, personne n'oubliera jamais parce que tout le monde a souffert de cette
guerre et souffre encore de ces déchaînements de violence, tant de morts, tant
de morts... Les épargnés de cette guerre ont toujours le sentiment d'avoir
été abandonnés et trahis.
L’épilogue écrite par Maïa ALONSO est bouleversant.
L'éditeur s'adresse aux Algériens qui liront cet ouvrage en
espérant que l'un d'entre eux, un jour, réalisera " un autre rêve
assassiné ".
Ce beau livre est le témoignage poignant d'un engagement d'idéaux livrés avec persévérance et courage. L'amour d'une Terre y domine, l'amour et le respect de l’autre y domine. L'amour tout court y domine.
Nous devons lire ce livre.
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